La parole s’irriguait
Dans le souffle du monde
Il y avait les aigles
Les cerfs
Les daims
Les grands poissons aux écailles vives
Les hommes l’avaient reçue
Dans le cercle du don
Les franchisseurs de cols au fourrures enneigées
Les clairsemeurs d’eau pure
Les déchiffreurs d’aurores
Désormais les visions
Rongeuses timorées de morne plaine
Pétrifiées par leur ombre
Et l’eau vive entachée
De trop de sermons de charbon sale
Et les paroles
Épuisées comme une herbe d’été
Le vent avait soufflé
Déployant les vertèbres
Essaimant les pupilles
Aujourd’hui il se tait
Quel chant pourrait bien naître
Sur cette terre vitrifiée
Lamée de herses grises
Et ces forêts arasées
Striées de nuques soumises ?
Et si ce silence
Saigne ton cœur de peine
Dis-toi qu’il n’est pas fin ;
Il est pont suspendu
Un gué entre deux voix
Où l’écho du passé
Insème un chant qui vient
Dans la suie des forêts
Sommeille le grain nouveau.