Umaniti

Dominique Radisson {Textes, poèmes & autres}

Une île

Une île,

Bien sûr, une île…

Quelle autre possible ?

Une île,
Point d’inflexion constant
Sur l’horizon certain,
Point d’interrogation brûlant
Sur la ligne du temps,
Point d’exclamation envoûtant
Sur la carte du tendre;

Source d’eaux et refuge
De fruits autant qu’abri,
Nuées d’oiseaux rares
Sous la frondaison claire
Des rêves flamboyants,
Pensées multicolores
Sur des lits de pivoines
Bordés d’une lune d’argent;

Une île,
Île mystère,
Tant de fois convoitée
Par les pirates du verbe
Forbans de la pensée
Flibustiers du désir;

Mais une île inconquise,
Jamais arraisonnée
Pure et respectée
Dans son atoll de lys;

Une île,
Vaisseau,
Territoire,
Continent
Univers;
Gorgée
Des fruits de la mémoire
Tapissés en corolles,
Cascades d’espoirs émeraudes
Et de sucs délectables,
Traces de pas sur le sable
Près la lèvre d’une eau blonde;

Une île,
Echappant à toute longitude
Ignorée des latitudes;

Nourrissant les étoiles
Lors des nuits de plein-jeûne,
Abreuvant tous les cieux
D’une liqueur de soie;

Corail en langue des sables
D’une tendresse inconnue
Lagons-sources insondables
Révélés par éclairs
Tapissés de lins bleus
Sous la chaleur ardente
De grandes prairies marines;

Mystère de l’en-dessous…
Oh oui, île de mystère!
Bras-parenthèses ouvrantes
Tutoyant l’infini;

Une île parcourue
De frissons de lave fauve
Sous des orages fertiles;

Une île fluctuante,
Animée de vents purs
Mais de courants contraires
Entre mer des possibles
Et océan du rêve;

Quelque part…

Une île aux seins de terre
Tendrement arrondie
Comme collines toscanes
Sous un ciel nu d’avril,
Au ventre chaud et doux
D’une tourterelle d’argile,
A-pics vertigineux
Chair d’améthystes rares
Déroutant les regards;

Une île
Aux mains de jonquilles fraîches
Comme des matins clairs;

Une île infiniment indifférente
Aux ouragans qu’elle attise
Par ses chants magnétiques,
Préférant ciseler
En orfèvre sensible
Son intime tectonique
Par des chemins secrets;

Une île faisant de l’ombre
A tous les continents;

Une île éternité
En l’épicentre de son secret
Où une déesse de lait
Fille du plus chaud soleil
Enfanta d’une vallée
Irrigante de miel;
Et d’un temple d’or ailé
Où les dieux s’émerveillent;

Une île d’une vie
Et du hasard des vagues;

Une île,
Dont la lumière honore
Chaque jour à cinq heures trente
Une à une les courbes
D’un fin pinceau d’aurore;

Enfin,

Une île,
Qu’un simple voyageur
Au sourire de joie
Sur un bateau rêveur
Éperdument,
Aima;

Une île,
Bien sûr, une île;

L’île d’Elle